Pour contrer le profilage racial : l’opposition exige le déploiement de caméras portatives au SPVM

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Montréal, le 4 février 2020 – Un an après le refus de l’administration Plante de procéder au déploiement de caméras portatives pour les policiers du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), une coalition d’élus municipaux et de groupes communautaires revient à la charge et exige que les caméras soient implantées rapidement au sein du SPVM afin de lutter efficacement contre le profilage racial. Ensemble Montréal déposera une motion en ce sens lors du prochain conseil municipal.

« Sur le plan du profilage racial, depuis un an, rien ne s’est amélioré. Au contraire: la situation s’est même dégradée. On l’a vu en octobre dernier, dans un rapport sur les interpellations policières, où on apprenait que les personnes autochtones et les personnes noires ont entre 4 et 5 fois plus de chances que les personnes blanches de se faire interpeller par le SPVM. Quant aux personnes arabes, elles sont en moyenne deux fois plus susceptibles d’être interpellées qu’une personne blanche », a déclaré M. Abdelhaq Sari, porte-parole d’Ensemble Montréal en matière de sécurité publique.

Le conseiller indépendant Marvin Rotrand abonde dans le même sens: « Depuis des années, le SPVM nous assure qu’il prend au sérieux le dossier du profilage racial avec des plans d’action, des politiques ou des formations. Beaucoup de vœux pieux, mais très peu de mesures concrètes. L’an dernier, il avait l’occasion d’agir en recommandant l’adoption des caméras portatives après la tenue d’un projet pilote. Mais il a refusé de le faire en se basant principalement sur des questions de coûts. C’est très regrettable. »

Les principaux arguments qui ont mené le SPVM à ne pas recommander l’utilisation des caméras portatives sont d’ailleurs contestés dans un nouveau rapport* commandé par M. Rotrand. Selon ce dernier, le SPVM a mal évalué les coûts du projet ainsi que l’impact des caméras sur la confiance du public.

« Selon le SPVM, il en coûterait 17,4 M$ pour implanter la technologie, puis 24 M$ par an en frais de personnel et gestion. Ces coûts sont démesurés et ne reflètent pas la réalité ni les différentes technologies sur le marché. Par exemple, on a choisi la technologie la plus dispendieuse pour le stockage des données vidéo, alors que d’autres villes s’en tirent à bien meilleur compte avec d’autres technologies », a expliqué M. Rotrand.

« Les caméras ont fait leurs preuves dans d’autres villes. Elles protègent à la fois les citoyens et les policiers. Les vidéos recueillies constituent un outil supplémentaire pour compléter les rapports d’événements des policiers, faciliter le partage de la preuve avec les procureurs, améliorer la perception du public et diminuer les recours non fondés contre les policiers. Notre motion demande que l’administration Plante revienne sur sa décision et autorise le déploiement des caméras le plus rapidement possible », a précisé M. Sari.

Des appuis dans la communauté

La motion présentée par Ensemble Montréal reçoit l’appui de nombreux groupes et organismes de défense des droits des Montréalais issus de la diversité. Parmi eux, le Centre de recherche-action sur les relations raciales (CRARR), soulignant au passage qu’une telle motion était tout indiquée en ce début du mois de l’histoire des Noirs.

« Ce que les Montréalais nous disent, c’est que le dossier du profilage racial est loin d’être réglé. Nous devons ramener le sujet des caméras portatives sur la table. N’oublions pas que la technologie a grandement évolué depuis la fin du projet pilote, en 2017. Nous sommes d’avis que les caméras portatives permettront de protéger à la fois les citoyens et les policiers. C’est une solution gagnant-gagnant », a affirmé M. Alain Babineau, du CRARR.

Également, le vice-président et membre fondateur de l’Association Musulmane de Montréal-Nord, M. Abdelaziz Rzik, a joint sa voix à celles des autres organismes en faveur de la motion. M. Rzik a notamment été membre du comité de vigie pour les communautés arabes au SPVM de 2008 à 2018.

« J’ai travaillé pendant plus de 10 ans sur les relations entre la communauté arabe et le SPVM; c’est un sujet qui me tient à cœur. Mon but a toujours été de combattre le profilage et de permettre un respect mutuel entre policiers et membres de ma communauté. Pour que nous puissions travailler ensemble, il faut de vraies actions: il faut déployer les caméras portatives », a-t-il déclaré.

La motion sera débattue lors du conseil municipal du 24 février prochain.

* Pour lire le rapport Bilan du projet-pilote de caméras portatives à Montréal : contre-analyse et pistes pour l’avenir, cliquez ici: https://bit.ly/3961Gjp


Motion visant le déploiement graduel et permanent des caméras portatives au SPVM

Attendu que, dans une optique d’imputabilité, de responsabilité, de transparence et de renforcement de la confiance du public envers leur service de police, des villes comme New York, Chicago, Los Angeles, Albuquerque, Fort Worth, Oakland et Calgary ont choisi d’implanter les caméras portatives;

Attendu que plusieurs études aux États-Unis font état d’une diminution significative de l’usage de la force dans les interpellations policières et des plaintes associées lorsque les policiers portent des caméras corporelles;

Attendu que le nombre d’interpellations effectuées par le Service de police de la Ville de Montréal (SVPM) a grimpé de 143 % entre 2014 et 2017, alors qu’il n’y a pas eu de hausse notable du nombre d’incidents criminels sur le territoire montréalais;

Attendu que depuis 2010,  des rapports sur les pratiques de profilage et d’interpellation ainsi que des plans stratégiques pour contrer le profilage racial se sont succédés au sein du SPVM sans pour autant donner des résultats concluants;

Attendu qu’entre mai 2016 et avril 2017, le SPVM a mis en place un projet pilote visant à équiper ses policiers de caméras portatives;

Attendu que lors du projet pilote, les enquêteurs ont utilisé les enregistrements vidéo pour améliorer les pratiques policières tel que le rapporte le document du SPVM;

Attendu que les résultats du projet pilote montrent que 69 % des patrouilleurs du SPVM reconnaissent que les caméras portatives peuvent être utiles notamment pour renforcer leur témoignage à la cour; 

Attendu que le sondage post-projet pilote, présenté dans le rapport du SPVM, a révélé que les citoyens étaient généralement plus satisfaits du service des policiers munis de caméras portatives;

Attendu que le rapport 2019 du projet pilote du SPVM sur les caméras portatives recommandait de ne pas aller de l’avant avec un déploiement, citant entre autres des coûts trop élevés;

Attendu que le rapport 2019 du SPVM a grandement surestimé les coûts de l’implémentation des caméras portatives, notamment sur la question des salaires; 

Attendu que l’administration montréalaise s’est basée sur les conclusions du rapport 2019 du SPVM pour ne pas déployer les caméras portatives;

Attendu que depuis la fin du projet pilote du SPVM, la technologie des caméras corporelles et du stockage des données s’est améliorée;

Attendu que les vidéos agissent comme un outil supplémentaire pour compléter les rapports d’événements des policiers, facilitent le partage de la preuve avec les procureurs de la Couronne, améliorent la perception du public sur le rôle des policiers et diminuent les recours vexatoires ou non fondés contre les policiers;

Attendu que les captations vidéo complètes d’une interpellation ou intervention policière permettront non seulement d’aider les citoyens, les policiers, les instances disciplinaires, déontologiques et judiciaires à éclaircir les circonstances d’une interpellation ou d’une intervention, mais aussi d’inciter les victimes d’abus à porter plainte et à remettre en question un comportement discriminatoire d’un policier;

Attendu que le déploiement à grande échelle des caméras portatives permettra de mettre en place une mesure concrète pour contrer le profilage racial au SPVM et rehausser la confiance du public envers le travail des policiers montréalais;

Attendu que le Commissaire à la vie privée du Canada recommande dans un rapport que les organisations qui utilisent les caméras corporelles se dotent de politiques et procédures identifiants les rôles et responsabilités des intervenants, d’un guide de procédures, en plus d’exiger pour l’autorité publique de garder tout contrôle sur les enregistrements afin que la vie privée et les renseignements personnels des citoyens soient respectés;

Il est proposé par        Abdelhaq Sari, Conseiller de la Ville du district de Marie-Clarac;

Appuyé par                 Mary Deros, Conseillère de la Ville du district de Parc-Extension;

Josué Corvil, Conseiller de la Ville du district de Saint-Michel;

Marvin Rotrand, Conseiller de la Ville du district de Snowdon;

Que la Ville de Montréal implante graduellement et de façon permanente les caméras portatives au SPVM à partir du 1er janvier 2021;

Que la Ville de Montréal adopte une réglementation stricte sur l’utilisation des caméras portatives afin d’assurer le respect à la vie privée et la protection des renseignements personnels des individus.

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